Le bruit, s’époumone. Quelqu’un crie, veut attirer l’attention. Que cache-t-il ? Rien. Une coquille vide. Mais cet homme qui reste assis, dans le fond, tapis dans l’ombre, c’est de cet homme que viendra l’Histoire. C’est ce chaman qui invoquera le silence apocalyptique dans lequel nous entendrons à nouveau. Il faut prendre du temps pour entendre ce discret compagnon. Or on décide que l’on n’a pas le temps pour le temps. On jette le silence à la poubelle, on lui défèque dessus, on le recouvre de chiasse. Et lorsque cette poubelle déborde, qu’elle est bonne à jeter, on s’aperçoit que l’on a appelé ça « notre vie ». Alors, on voudrait faire encore plus de bruit pour que celui-ci nous offre une poubelle plus grande. Mais non, notre dernier cri se perd dans le regard indifférent de cet éboueur qu’est le temps…. Il n’a pas fini de nettoyer notre chiure que déjà il nous empoigne et laisse paraître un sourire narquois. C’est à son tour de nous rendre la pareille.
La vie laisse partir un cadavre chiasseux à l’enterrement gênant. Personne ne l’a réellement aimé, personne ne l’a réellement connu car il n’y avait rien à connaître. Le bruit s’en est allé de lui et déjà, des autres, des milliers de millions de milliards d’autres, requièrent sa présence. Il faut qu’il soit là, il faut qu’il les câline. Il s’y emploie avec joie car qu’est-ce qui l’en empêcherait ? Il n’y a que vous pour le stopper, mais vous ne le voulez pas. Vous êtes bien, là, avec lui. Et pourquoi ne le seriez-vous pas ? Vous n’avez pas entendu parler du cadavre chiasseux, ayant vécu dans le bruit mais étant mort sans lui, et comment en auriez-vous entendu parler ? Personne ne parlera jamais de lui, car qui s’en préoccupe, de ce médiocre ? Un anonyme qui s’est caché toute sa vie, jusqu’à disparaître dans la mort. Il n’y a personne pour le mépriser, pas même le silence. Lui a toujours été là. Lui sait qu’un jour ou l’autre il reviendra, alors que notre bruit… Oui, la prochaine fois que vous allez quelque part et que, comme un camé en manque vous avez soudain besoin d’une bonne dose de bruit, prenez un moment avant de vous soulager. Le silence, respire.
